Private equity : un investissement alternatif au service des entreprises non cotées
Le private equity (ou capital-investissement) désigne l’ensemble des investissements réalisés dans des entreprises non cotées en Bourse. Contrairement à l’investissement classique sur les marchés financiers, il s’inscrit dans une logique de long terme, de prise de participation directe et d’accompagnement stratégique. Mais comment fonctionne réellement ce modèle ? En quoi se distingue-t-il d’un investissement en actions cotées ? Quels sont ses risques, ses promesses et ses impacts concrets sur le tissu entrepreneurial français ? Éléments de réponse.
En quoi le private equity diffère-t-il de l’investissement en Bourse classique ?
Investir en Bourse consiste à acheter des titres de sociétés cotées sur des marchés réglementés, comme le CAC 40. L’investisseur devient alors actionnaire minoritaire d’une entreprise dont la gestion reste largement indépendante. La liquidité est élevée : les titres peuvent être achetés ou vendus à tout moment, en quelques clics.
À l’inverse, le private equity cible exclusivement des entreprises non cotées, souvent des PME ou des TPE. L’investisseur, via un fonds, prend une participation directe dans le capital de la société. Il accompagne activement son développement, avec une durée de détention d'environ huit ans. La liquidité est faible : la sortie ne peut intervenir qu’à l’occasion d’un événement structurant (revente, introduction en Bourse, fusion...).
Ainsi, là où l’investissement boursier permet une gestion dynamique et liquéfiable du portefeuille, le private equity impose une vision long terme, plus risquée mais potentiellement plus rémunératrice.
Qu’est-ce que le private equity et comment fonctionne-t-il ?
Le private equity repose sur une chaîne bien structurée. Des fonds spécialisés collectent des capitaux auprès d’investisseurs (institutionnels ou particuliers), puis les investissent dans des entreprises sélectionnées pour leur potentiel. En échange de leur apport financier, les fonds deviennent actionnaires, souvent avec des droits de gouvernance.
Ces fonds n’agissent pas comme de simples apporteurs de capitaux : ils participent activement à la stratégie de l’entreprise, au recrutement, à la gouvernance, voire à la réorganisation opérationnelle. Leur objectif : créer de la valeur, pour ensuite revendre leur participation à un prix supérieur.
Le private equity ne se limite pas à une seule forme d’investissement : il englobe plusieurs stratégies qui répondent à des logiques économiques et à des profils d’entreprises très différents.
La première, le capital-risque (ou venture capital), consiste à financer les phases précoces de jeunes entreprises innovantes, souvent dans les secteurs technologiques ou de la santé. L’enjeu est ici d’accompagner des projets à fort potentiel de croissance, mais aussi à risque élevé, car leur modèle économique n’est pas encore pleinement éprouvé.
Le capital-développement, quant à lui, vise à soutenir des PME ou ETI déjà rentables, qui cherchent des fonds pour accélérer leur expansion : lancement de nouveaux produits, développement à l’international, croissance externe… Cette stratégie présente un niveau de risque plus modéré, avec des perspectives de rendement attractives.
Le capital-transmission, ou buyout, intervient lors du rachat d’entreprises matures, souvent par le biais d’un effet de levier (LBO – leveraged buy-out). L’objectif est ici de restructurer la gouvernance, d’optimiser la rentabilité et d’augmenter la valeur de l’entreprise avant une revente, généralement dans un horizon de 5 à 7 ans.
Enfin, le capital-retournement cible des sociétés en difficulté financière ou opérationnelle. L’investisseur prend alors des mesures fortes pour redresser l’entreprise : réorganisation, recentrage stratégique, remplacement des équipes dirigeantes… Cette stratégie est la plus risquée, mais peut offrir des retours importants en cas de succès.
Un meilleur alignement des intérêts entre gérants et épargnants
L’un des grands atouts du private equity réside dans l’alignement des intérêts entre les gestionnaires de fonds et les investisseurs. Contrairement à certains modèles de gestion d’actifs où la rémunération repose principalement sur des frais fixes ou sur le volume d’encours, les gérants de fonds de private equity sont en grande partie rémunérés à la performance.
Le mécanisme central de cet alignement est le carried interest. Il s’agit d’une part des plus-values réalisées par le fonds qui revient aux gérants uniquement si un seuil de rentabilité prédéfini est atteint (par exemple, un taux de rendement interne de 8 % par an pour les investisseurs). Cela crée une incitation forte à générer une performance réelle et durable, et à ne pas prendre de risques excessifs au détriment des souscripteurs.
En parallèle, l’approche même du private equity, fondée sur l’investissement long terme et l’accompagnement stratégique des entreprises, limite naturellement la spéculation. Ici, il n’est pas question d’achats et de ventes opportunistes sur les marchés, mais d’une implication continue dans la gouvernance et la croissance de sociétés en développement. Cette temporalité, plus lente mais plus enracinée dans l’économie réelle, renforce la logique de co-construction de valeur plutôt que de recherche de gains à court terme.
Comment les fonds sélectionnent-ils les entreprises cibles ?
La sélection des entreprises dans lesquelles investissent les fonds repose sur une analyse approfondie du potentiel de création de valeur. Ils privilégient généralement celles qui disposent d’un positionnement différenciant sur leur marché et sont dirigées par une équipe compétente. Ces entreprises doivent aussi présenter un potentiel de croissance ou d’amélioration opérationnelle. L’objectif est d’identifier des leviers capables de transformer la société en quelques années, que ce soit par le développement commercial, l’amélioration des marges, l’expansion à l’international ou encore la digitalisation. Avant tout engagement, chaque opération fait l’objet d’une due diligence rigoureuse, incluant une analyse financière, juridique et stratégique.
Quelles stratégies sont mises en place pour accroître la valeur des entreprises financées ?
Les fonds de private equity ne se limitent pas à un rôle financier : ils s’impliquent activement dans la transformation des entreprises, en agissant comme de véritables partenaires stratégiques.
Ils commencent souvent par professionnaliser la gestion, en structurant la gouvernance, en recrutant des profils clés et en optimisant les outils financiers. Ils favorisent ensuite la croissance externe, en accompagnant le rachat de sociétés complémentaires pour accélérer la montée en puissance.
Le développement à l’international fait également partie des axes majeurs, avec un soutien sur les aspects stratégiques, commerciaux et réglementaires. En parallèle, les fonds veillent à l’optimisation opérationnelle : réduction des coûts, amélioration des marges, rationalisation des processus.
Enfin, ils encouragent l’innovation et la transformation digitale, leviers essentiels pour renforcer la compétitivité à long terme.
L’objectif est double : révéler le potentiel de l’entreprise et structurer une trajectoire de sortie claire, créatrice de valeur pour l’ensemble des parties prenantes.
Quels sont les risques spécifiques liés à l’investissement en private equity ?
Le private equity se distingue par un profil de risque spécifique, qu’il convient de bien appréhender avant d’investir.
Il s’agit d’abord d’un placement illiquide : les fonds sont engagés sur une durée longue (souvent 7 à 10 ans), sans possibilité de retrait anticipé. Cette contrainte exige une réelle capacité d’immobilisation du capital.
Par ailleurs, l’investisseur s’expose à un risque de perte en capital. Certaines entreprises accompagnées peuvent échouer, ce qui peut affecter significativement la performance du fonds.
La valorisation des actifs constitue une autre spécificité. En l’absence de cotation en temps réel, les titres sont évalués périodiquement, sur la base de critères internes ou d’expertises. Cette opacité peut rendre le suivi de performance moins lisible.
Enfin, les frais sont plus élevés que dans les placements classiques. Outre les frais de gestion, les fonds perçoivent souvent une commission de performance (carried interest), qui peut réduire le rendement net.
Malgré ces limites, le private equity séduit de plus en plus d’investisseurs avertis. Ses performances historiques, souvent supérieures à celles des marchés cotés sur le long terme, justifient cet engouement croissant.
Le private equity peut-il être accessible aux particuliers ?
Historiquement réservé aux investisseurs institutionnels, le private equity tend à se démocratiser. Les particuliers peuvent désormais y accéder via :
• des FCPR (fonds communs de placement à risques),
• des FCPI (fonds pour l’innovation),
• ou des FIP (fonds d’investissement de proximité).
Ces fonds sont accessibles via un compte-titres, un contrat d’assurance-vie ou un PEA-PME. Certains dispositifs offrent aussi des avantages fiscaux (réduction d’impôt sur le revenu ou d’IFI), en contrepartie du blocage des sommes investies.
Il est néanmoins essentiel d’adapter l’exposition au private equity à son profil d’investisseur : horizon long terme, tolérance au risque élevée, et diversification indispensable.
Quel impact du private equity sur la croissance des PME et TPE françaises ?
Le private equity joue un rôle essentiel dans le financement de l’économie réelle. En apportant des capitaux de long terme et en s’impliquant activement dans la stratégie des entreprises, il soutient leur transformation en profondeur.
Ce soutien se traduit concrètement par la création d’emplois, le développement de l’innovation, mais aussi par la montée en gamme des PME industrielles, notamment via la modernisation des outils de production ou l’exportation. Le private equity intervient également dans la transmission d’entreprises familiales, en assurant leur pérennité lors des changements de génération.
En investissant directement dans le tissu entrepreneurial, cette classe d’actifs contribue ainsi à dynamiser la croissance et à renforcer la compétitivité de l’économie.
Selon France Invest, les sociétés accompagnées par des fonds de capital-investissement enregistrent des taux de croissance et de création d’emplois supérieurs à la moyenne nationale. En investissant dans des secteurs stratégiques (santé, transition énergétique, numérique...), le private equity devient un vecteur de compétitivité pour les territoires.
Conclusion
Investir en private equity, c’est choisir de soutenir le développement de l’économie réelle, en dehors des marchés financiers traditionnels. C’est accepter une moindre liquidité et un risque accru, en échange d’un potentiel de rendement supérieur et d’un impact concret sur les entreprises françaises. Mais c’est aussi un univers complexe, qui nécessite accompagnement, discernement et patience. À long terme, il peut représenter une réelle opportunité de diversification pour les investisseurs avertis, désireux d’allier performance et sens.