L’entrepreneuriat comme acte fondateur
Didier Truchot n’est pas né patron. Il débute sa carrière au sein de l’IFOP, institut de sondage traditionnel, où il apprend les bases du métier d’études. Mais très vite, il ressent une frustration profonde : Celle de ne pas pouvoir innover, transformer, proposer une nouvelle manière de répondre aux besoins des clients. Dans une époque encore marquée par des structures hiérarchiques rigides, il prend le contre-pied. En 1975, il fait le pari de la liberté. Sans salariés, sans capital externe, il crée Ipsos, un cabinet à taille humaine, centré sur les études de publicité.
Ce choix de tout quitter pour se lancer seul n’était ni commun ni glorifié à l’époque. Il s’agit d’un véritable saut dans l’inconnu, avec une prise de risque maximale. Mais Truchot le dit lui-même : l’entrepreneuriat, ce n’est pas juste créer une entreprise, c’est s’engager corps et âme dans une idée, y consacrer ses jours et ses nuits, en porter la responsabilité totale. Et surtout, ne jamais attendre que quelqu’un vous dise quoi faire.
De la passion à l’emploi : Bâtir pour les autres
L’un des aspects les plus frappants dans l’histoire d’Ipsos, c’est son développement humain. D’une entreprise unipersonnelle, elle est devenue une organisation de plusieurs milliers de collaborateurs. Cette évolution n’est pas qu’un simple changement d’échelle. C’est un basculement fondamental dans le rôle de l’entrepreneur.
Car très vite, Truchot comprend que pour grandir, il doit s’entourer. Il recrute, forme, délègue. En 1982, il s’associe avec Jean-Marc Lech, qui deviendra son alter ego et co-dirigeant pendant plus de trente ans. Ensemble, ils forgent une culture d’entreprise à la fois rigoureuse et agile, où l’excellence méthodologique cohabite avec l’audace entrepreneuriale.
Chaque embauche est un acte de foi. En intégrant de nouveaux collaborateurs, Truchot ne cherche pas seulement à répondre à une charge de travail accrue, mais à construire une intelligence collective. L’emploi devient ici un outil de développement au service d’un projet plus large : Celui d’inventer une nouvelle manière de produire et d’analyser des données utiles à la décision publique et privée.
L’introduction en bourse : Franchir un nouveau cap
En 1999, Ipsos fait un choix stratégique majeur : son introduction en bourse sur Euronext Paris. Cette décision marque une nouvelle étape dans la vie de l’entreprise. En ouvrant son capital au marché, Didier Truchot affirme son ambition de faire d’Ipsos un acteur mondial, tout en consolidant sa structure financière.
Mais l’entrée en bourse est bien plus qu’une opération technique. C’est un changement de gouvernance, de culture, de responsabilité. Il faut rendre des comptes à des investisseurs, structurer la communication financière, renforcer les contrôles internes. Pour beaucoup d’entrepreneurs, c’est le moment où l’indépendance se perd. Mais Truchot, lui, réussit à conserver les rênes grâce à un savant équilibre entre actionnariat personnel et alliances stratégiques. En structurant un pacte d’actionnaires autour de LT Participations, il maintient une ligne directrice claire et évite les dérives court-termistes.
Le développement comme philosophie
La croissance d’Ipsos n’a jamais été une fin en soi, mais une conséquence logique de son positionnement. Dans un monde en transformation rapide, marqué par la mondialisation et la montée des nouveaux médias, les entreprises et les gouvernements ont de plus en plus besoin de comprendre les comportements, les opinions, les attentes. Truchot, visionnaire, anticipe ces mutations et diversifie progressivement l’offre d’Ipsos : publicité, opinion, marketing, médias, santé, technologies… chaque secteur est exploré avec exigence.
Ce développement ne repose pas uniquement sur la croissance organique. Truchot sait aussi faire des choix stratégiques forts. En 2011, il réalise l’une des plus grandes acquisitions du secteur en rachetant Synovate, un concurrent international. Cette opération, risquée mais parfaitement exécutée, propulse Ipsos dans le top 3 mondial.
Mais au-delà des chiffres, ce développement s’inscrit dans une logique profondément entrepreneuriale : il ne s’agit pas de devenir le plus gros pour satisfaire des actionnaires, mais de construire une entreprise capable d’avoir un véritable impact, de peser dans les débats de société, de proposer des outils de décision aux institutions, aux marques, aux citoyens.
De l’échec à la résilience
Bien sûr, tout n’a pas toujours été simple. L’histoire d’Ipsos est aussi marquée par des périodes de doute, des phases de ralentissement, des erreurs d’appréciation. Dans les années 2000, la croissance ralentit, certains marchés deviennent instables, la transformation numérique met à mal les méthodes traditionnelles d’enquête.
Mais là encore, Didier Truchot fait preuve de résilience. Il accepte de se remettre en question, de revoir ses modèles, de s’entourer de nouvelles compétences. Il investit dans la data science, intègre les données comportementales, digitalise les processus. Ce qui aurait pu être un déclin se transforme en rebond.
Cette capacité à surmonter l’échec, à en tirer des leçons plutôt qu’à le nier, est l’une des marques de fabrique du grand entrepreneur. Pour Truchot, l’échec n’est jamais une fin, c’est une étape de l’apprentissage.
Une transmission réussie : L’indépendance jusqu’au bout
En 2021, Didier Truchot quitte ses fonctions exécutives mais reste président du conseil d’administration d’Ipsos. Il passe le relais à Ben Page, ancien directeur général d’Ipsos UK. Cette transition illustre une autre dimension de l’entrepreneuriat : Celle de la transmission.
Plutôt que de vendre à un fonds ou à un groupe concurrent, Truchot choisit la continuité. Il organise une gouvernance stable, respectueuse de l’ADN de l’entreprise. Il conserve une influence stratégique tout en laissant opérer une nouvelle génération de dirigeants. L’entreprise reste indépendante, fidèle à ses valeurs, mais capable de s’adapter.
Cette fidélité à l’indépendance, à l’engagement long terme, fait d’Ipsos une exception dans un secteur souvent dominé par des logiques de fusion, de centralisation ou de financiarisation excessive.
Un parcours inspirant, un exemple à suivre
Didier Truchot n’est pas seulement le fondateur d’une des plus belles réussites entrepreneuriales françaises. Il est aussi l’incarnation d’une certaine idée de l’entrepreneuriat : celle qui place la passion, la responsabilité et la vision au cœur de l’action.
Son parcours montre qu’il est possible de partir de presque rien, de créer de l’emploi, de porter un projet utile à la société, d’atteindre des sommets sans renier ses convictions. Il rappelle aussi que l’entrepreneuriat est une aventure humaine, faite de doutes, de rencontres, de persévérance.
Vous souhaitez découvrir les coulisses de la success story Ipsos, comprendre les choix stratégiques de Didier Truchot, explorer les enjeux de l’introduction en bourse, ou encore réfléchir à ce que signifie réellement "réussir" en tant qu’entrepreneur ?
Écoutez notre épisode complet du podcast L’Art de la Gestion Patrimoniale, disponible sur toutes les plateformes. Un format immersif pour inspirer tous ceux qui veulent, eux aussi, bâtir un projet durable, indépendant… et ambitieux.